ARMEMENTS (CONTRÔLE DES)

ARMEMENTS (CONTRÔLE DES)
ARMEMENTS (CONTRÔLE DES)

ARMEMENTS CONTRÔLE DES

L’étendue des destructions causées par les deux conflits mondiaux, et plus encore l’arme nucléaire dont l’utilisation représente une menace pour l’avenir de l’espèce humaine ont conféré une signification nouvelle aux tentatives de supprimer, ou tout au moins de limiter, les armements et les effectifs militaires. La possibilité d’une limitation des armements a été envisagée pour la première fois par une instance internationale lors des conférences de La Haye de 1899 et de 1907. Après la Première Guerre mondiale, à partir de la formule «arbitrage, sécurité, désarmement», des négociations internationales menèrent à la Conférence du désarmement (1932-1935). Ses débats, ayant buté sur des définitions élémentaires (qu’est-ce qu’une arme offensive? qu’est-ce qu’une arme défensive?), aboutirent à un fiasco complet.

Au lendemain d’Hiroshima et de Nagasaki, il était évident que la maîtrise de l’énergie atomique à des fins militaires posait à nouveau le problème avec insistance: était-il inconcevable d’éliminer un tel pouvoir de destruction?

Dès 1946, les États-Unis soumettent à la Commission de l’énergie atomique de l’O.N.U. le plan Baruch, qui prévoit:

— la création d’une autorité internationale spécialisée à laquelle serait confié le monopole de l’utilisation de l’énergie atomique ainsi que le droit de propriété et de gestion sur les mines d’uranium et les installations industrielles traitant le minerai;

— une fois cette autorité installée, la destruction du stock de bombes existant (uniquement américain à cette époque).

L’opposition soviétique est très vigoureuse: ce plan stabilise l’avance technologique des États-Unis en interdisant à l’U.R.S.S. de poursuivre ses recherches. Par ailleurs, les pouvoirs accordés à l’autorité internationale impliquent un droit de regard dans les affaires intérieures soviétiques, ce qui est jugé inacceptable.

Après cet échec, des comités d’experts et même des conférences au sommet (comme en 1955) abordent le problème du désarmement nucléaire, mais, faute d’un consensus général, ne peuvent dépasser le stade des propositions (destruction des stocks d’armes, des matières fissiles, des vecteurs).

Toutefois à partir de 1958, des pourparlers politiques se nouent entre les États-Unis et l’U.R.S.S. La crise de Cuba (1962) et l’entrée de la France (1960) puis de la Chine (1964) dans le «club nucléaire» vont accélérer la conclusion de traités, ouvrant timidement la voie à un désarmement très limité et discriminatoire. Les textes de ces traités peuvent s’ordonner autour de deux notions:

— la non-prolifération horizontale, ou limitation du nombre des États dotés de la capacité nucléaire;

— la non-prolifération verticale, ou limitation, en qualité et en quantité, de la panoplie d’armes détenue par les États nucléaires.

Peut-on considérer le traité de Moscou (1963), relatif à l’arrêt partiel des expériences nucléaires, comme ressortissant à une volonté de non-prolifération horizontale? Oui, dans la mesure où, en interdisant les expérimentations nucléaires dans l’atmosphère, l’espace extra-atmosphérique et l’eau, il crée des difficultés aux États qui veulent se doter d’un armement nucléaire. En 1976, les États-Unis et l’U.R.S.S. devaient s’accorder pour limiter les essais souterrains aux bombes de moins de 150 kilotonnes.

Un texte plus élaboré sera étudié par le comité du désarmement, institué par l’O.N.U. en 1961 et plus connu sous le nom de comité des Dix-Huit (bien qu’il ne compte que dix-sept membres, par suite de l’absence volontaire de la France). Le traité de non-prolifération des armes nucléaires (T.N.P.), signé le 1er juillet 1968, marque une première étape dans la voie d’un désarmement nucléaire en ceci qu’il interdit aux États dotés d’armes nucléaires et signataires du traité de transférer à qui que ce soit des armes nucléaires ou d’aider à la fabrication de celles-ci au profit d’États non dotés d’armement de ce type. Ces derniers s’engagent réciproquement à n’accepter aucune arme ni aucune aide. L’Agence internationale de l’énergie atomique apporte sa garantie à l’exécution de ces obligations. Entré en vigueur en 1970, le T.N.P. a été rendu permanent par décision de cent soixante-quinze pays signataires, rassemblés à New York le 11 mai 1995. Ainsi se trouve pérennisée l’existence d’un «club nucléaire» très fermé, dont les membres — les États-Unis, la Russie, la Chine, la France et le Royaume-Uni — n’ont pas établi de calendrier précis de désarmement, mais ont tenu à fixer à 1996 l’interdiction totale des essais nucléaires. Quant aux autres pays, ils renoncent, en principe, à posséder jamais l’arme nucléaire. Pour autant, six pays ont, en dehors du «club», atteint le «seuil nucléaire»: l’Inde, le Pakistan et Israël, mais aussi, l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord, tous trois signataires du T.N.P. Ce dernier ne comporte pas de dispositif de coercition et ne constitue pas l’antidote absolu à la prolifération nucléaire, mais il en a probablement limité les effets.

En ce qui concerne la non-prolifération verticale, elle est l’objet de négociations exclusivement bipartites entre l’U.R.S.S. et les États-Unis, les S.A.L.T. (Strategic Arms Limitation Talks). Elles ont été provoquées, à partir de 1967, par deux constatations: l’existence, en U.R.S.S. comme aux États-Unis, d’une «puissance excessive de dissuasion», selon l’expression de Robert McNamara, et les dépenses énormes — insupportables — qu’exigerait le déploiement d’un réseau de missiles antimissiles (réseau A.B.M.: anti-ballistic missiles ). Il s’agissait alors, pour Richard Nixon et Leonid Brejnev, de limiter les armements nucléaires stratégiques (offensifs et défensifs) américains et soviétiques. Les négociations S.A.L.T. I durèrent deux ans (1970-1972). Les Américains insistèrent pour que la limitation des systèmes A.B.M. fût accompagnée d’une limitation des armements offensifs. Les Soviétiques finirent par accepter d’exclure de la négociation les bombardiers et les systèmes avancés (c’est-à-dire les armements nucléaires américains en Europe), mais d’y inclure les missiles sous-marins (S.L.B.M.: submarine launched ballistic missiles ). Le 26 mai 1972, les dirigeants des deux pays signent à Moscou le traité sur la limitation des systèmes antimissiles, ainsi qu’un accord intérimaire, valable cinq ans seulement, sur la limitation des armements offensifs (bombardiers et systèmes avancés exclus).

S.A.L.T. II a rapidement commencé, et en 1973 Nixon et Brejnev envisageaient un accord pour 1974. Il faudra toutefois attendre 1979 pour voir signer un accord à Vienne. Conclu par Jimmy Carter et Leonid Brejnev, ce dernier limite à 2 400 pour chacune des parties le nombre total des lanceurs stratégiques, c’est-à-dire des missiles pouvant être équipés de têtes multiples et guidables vers autant de cibles distinctes. Non ratifié par le Sénat américain en raison de l’invasion de l’Afghanistan par l’U.R.S.S., appliqué néanmoins, l’accord devait être prolongé, à partir de 1982, par les négociations S.T.A.R.T. (Strategic Arms Reduction Talks), ouvertes à l’initiative de Ronald Reagan.

L’objet est, cette fois, de parvenir à réduire significativement l’arsenal de missiles et de têtes nucléaires possédé par chacune des deux superpuissances. Il faudra attendre juillet 1991 pour voir Georges Bush et Mikhaïl Gorbatchev signer à Moscou un traité abaissant le «plafond stratégique» à 1 600 lanceurs et 6 000 têtes balistiques par État. Rendu inapplicable par la désintégration de l’U.R.S.S., S.T.A.R.T. I a nécessité l’ouverture de nouvelles négociations entre les États-Unis et les quatre puissances nucléaires ex-soviétiques: la Russie, l’Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan; en mai 1992, celles-ci sont convenues d’adhérer au traité de Moscou, les trois dernières d’entre elles s’engageant soit à détruire elles-mêmes les têtes nucléaires installées sur leur sol, soit à les remettre à la Russie. Moscou, pour sa part, poursuivait avec Washington des négociations dites S.T.A.R.T. II que devait conclure un nouveau traité, le 3 janvier 1993: aux termes de celui-ci, les plafonds stratégiques seront réduits à 3 500 têtes balistiques pour les États-Unis et à 3 000 pour la Russie; l’accord prévoit encore l’élimination sur dix ans des missiles lourds et des têtes multiples.

Parallèlement aux S.T.A.R.T., les années 1980 ont vu, sur fond d’épreuve de force entre les États-Unis et l’U.R.S.S., l’ouverture et la conclusion par ces derniers de négociations qui dépassaient la simple notion de contrôle des armements. Pour la première fois, en effet, le traité signé à Washington, le 8 décembre 1987, sur les forces nucléaires intermédiaires (en anglais, I.N.F.) a débouché sur l’élimination d’une catégorie entière d’armes, les deux États ayant accepté de détruire leurs stocks de missiles à moyenne et à courte portée (respectivement, de 1 000 à 5 500 kilomètres et de 500 à 1 000 kilomètres).

L’intensité de la rivalité américano-soviétique et les énormes capacités de destruction que celle-ci mettait en jeu ont, en matière de contrôle des armements, donné la primauté aux négociations bilatérales. Il faut cependant citer, en plus du T.N.P., deux autres instruments multilatéraux: les traités sur les forces conventionnelles en Europe de 1990 et 1992, engageant vingt-neuf États, et celui dit de Paris sur l’interdiction à terme des armes chimiques, signé le 15 janvier 1993 par cent trente pays.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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